Fourniture d'électricité et de gaz en France : acteurs, régulations et défis
En France, l’approvisionnement en électricité et en gaz peut parfois être un véritable défi. En parallèle, les enjeux stratégiques (économique et géopolitique) sont eux aussi à considérer. Longtemps sous monopole d’État avec des acteurs historiques comme EDF et GDF, le marché français de l’énergie a finalement connu une profonde transformation dans les années 2000. Enfin voyait le jour la libéralisation progressive du marché au niveau européen, ouvrant la voie à de nouveaux acteurs, plus économiques !
Toutefois, cette mutation s’est aussi accompagnée de nouveaux enjeux : transition énergétique, régulation du marché, sécurité d’approvisionnement, lutte contre la précarité énergétique : le programme est aussi vaste que complexe. C’est pourquoi nous vous proposons une analyse du marché français de l’énergie (gaz et électricité). Des principaux acteurs aux régulations en place, en passant par les défis auxquels le marché est confronté, Place des Énergies fait le point.
Tour d’horizon du marché français de l’énergie
Le marché de l’électricité en France n’a pas toujours été ce qu’il est aujourd’hui. Suivez le guide !
La petite histoire de la libéralisation du marché
Historiquement, le secteur de l'énergie était dominé par EDF (Électricité de France) pour l’électricité et GDF (Gaz de France) pour le gaz. Ces deux fournisseurs historiques contrôlaient la totalité des processus.
Mais ça, c’était avant la libéralisation du marché français ! Initiée par les directives européennes à partir de 1996, elle a conduit à une ouverture progressive à la concurrence : d’abord pour les gros consommateurs industriels, puis pour les particuliers à partir de 2007.
De fait, cette ouverture s’est accompagnée d’une séparation fonctionnelle des activités de production, transport, distribution et fourniture. En parallèle, elle a également entraîné la création de marchés de gros (ex : EPEX SPOT pour l’électricité) et de marchés de détail.
Le marché de l’électricité en France en 2025
Aujourd’hui, le marché de l’énergie est donc structuré autour de quatre grandes activités :
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Production : la fabrication d’électricité à partir de différentes sources (nucléaire, hydraulique, énergies renouvelables, etc.).
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Transport : l’acheminement de l’énergie sur de longues distances via des réseaux haute tension ou haute pression.
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Distribution : la livraison au consommateur, via des réseaux locaux.
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Fourniture : la vente de l’énergie aux clients finaux.
Il faut savoir qu’à ce jour, le mix énergétique français est encore particulièrement marqué par le poids du nucléaire, qui assure environ 70 % de la production d’électricité. Malgré tout, les énergies renouvelables (hydraulique, éolien, solaire, biomasse) montent en puissance.
L’article à lire : Hydrogène vert : une solution d’avenir ?
Les principaux acteurs du marché de l’électricité et du gaz en France
EDF, on connaît. Engie, on connaît aussi. Depuis la libéralisation du marché, de nombreux autres acteurs les ont toutefois rejoints. Mais au fait, quelle est la différence entre les fournisseurs historiques et ces nouveaux fournisseurs alternatifs ?
Les fournisseurs historiques
EDF reste l’acteur principal de l’électricité en France. Producteur, fournisseur, et même gestionnaire de réseau à travers Enedis, EDF conserve une position dominante, notamment grâce à son parc nucléaire. Ainsi, bien que la libéralisation ait réduit son monopole, l’entreprise conserve son rôle historique, une grande capacité de production centralisée, ainsi qu’une belle couverture nationale.
De son côté, Engie (anciennement GDF Suez) est l’acteur principal sur le marché du gaz : fourniture, développement du gaz renouvelable, services d’efficacité énergétique, rien ne lui échappe ! Peu à peu, Engie s’est progressivement diversifié dans l’électricité, notamment via les énergies renouvelables comme l’éolien terrestre et offshore, ainsi que le solaire.
Ainsi, force est de constater que ces deux géants de l’énergie conservent une forte empreinte dans le paysage énergétique français, bien qu’ils soient aujourd’hui soumis à une concurrence de plus en plus vive sur le marché de détail.
Les fournisseurs alternatifs
Depuis l’ouverture à la concurrence, de nombreux fournisseurs alternatifs sont apparus. Pour le plus grand bonheur des Français, qui ont pu enfin comparer les tarifs et trouver des offres moins chères ou plus adaptées à leurs besoins ! Parmi eux, nous pouvons citer :
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TotalEnergies : un acteur très actif sur le marché de l’électricité et du gaz pour les particuliers. Il propose des offres à prix de marché, souvent indexées sur les tarifs réglementés, tout en développant des offres vertes en parallèle.
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Ohm Énergie, ekWateur, Octopus Energy : des fournisseurs innovants qui misent principalement sur l’offre verte, la transparence et l’engagement écologique. Idéal si vous cherchez de l’électricité d’origine renouvelable certifiée par des garanties d’origine !
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Eni, Vattenfall, Mint Énergie : groupes internationaux ou indépendants qui diversifient l’offre et intensifient la concurrence tarifaire (les remises importantes sur le prix du kWh ne sont pas rares !).
Pour faire face aux géants historiques, ces acteurs misent avant tout sur la différenciation : des prix attractifs, un service client digitalisé, un engagement environnemental fort.
Quel est le rôle des gestionnaires de réseau ?
Parmi les taxes présentes sur vos factures d’énergie, figure une ligne pour le transport de l’énergie: la Contribution Tarifaire d'Acheminement (CTA). En France, les réseaux de transport sont gérés par :
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RTE (Réseau de Transport d’Électricité), une filiale indépendante d’EDF chargée de l’acheminement de l’électricité haute et très haute tension sur l’ensemble du territoire.
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GRTgaz et Teréga, qui transportent le gaz naturel sur de longues distances via des canalisations à haute pression. GRTgaz couvre la majeure partie du territoire, tandis que Teréga opère principalement dans le Sud-Ouest.
La distribution est quant à elle assurée par Enedis pour 95 % des foyers français.
Bon à savoir : Enedis gère également les réseaux électriques basse et moyenne tension et intervient pour les raccordements, les relevés ou les dépannages.
De son côté, GRDF est le principal distributeur national de gaz, également responsable de la gestion des compteurs, des interventions techniques et de la sécurité des installations.
Il est important de noter que ces gestionnaires sont tenus à une neutralité stricte. À ce titre, ils doivent garantir un accès équitable aux infrastructures pour l’ensemble des fournisseurs, afin d’assurer un bon fonctionnement concurrentiel du marché (alors qu’ils sont eux-mêmes fournisseurs, eh oui !).
Entre réglementations et mécanismes de régulation de l’énergie
De nombreuses réglementations rythment le fonctionnement du gaz et de l'électricité en France. En parallèle, des mécanismes de régulation permettent de trouver un juste équilibre.
La régulation tarifaire
Malgré la libéralisation, certains tarifs sont encore encadrés. On appelle cela les tarifs réglementés de vente (TRV). Ils sont fixés par les pouvoirs publics, sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Aujourd’hui, ils concernent principalement les particuliers (tarif bleu d’EDF) et les petits professionnels pour l’électricité. Leur objectif : garantir une certaine stabilité des prix et protéger les consommateurs les plus vulnérables.
Du côté du gaz naturel, les TRV ont été progressivement supprimés à partir de 2020, jusqu’à leur disparition totale en juin 2023. Les clients concernés ont alors dû basculer vers des offres de marché, proposées soit par le fournisseur historique (Engie), soit par des fournisseurs alternatifs.
Le saviez-vous ? Les TRV sont souvent critiqués : certains y voient un frein à la concurrence, d’autres un outil indispensable de justice sociale. Leur maintien ou leur suppression reste d’ailleurs un sujet politique sensible, notamment en période de crise énergétique ou d’inflation !
Les mécanismes d’ajustement du marché
Pour favoriser une concurrence équitable entre fournisseurs historiques et alternatifs, plusieurs mécanismes ont été mis en place. Le plus emblématique est l’ARENH (Accès régulé à l’électricité nucléaire historique), qui prendra “sa retraite” fin 2025. Il permet aux fournisseurs alternatifs d’acheter jusqu’à 100 TWh par an d’électricité produite par le parc nucléaire d’EDF, à un prix fixé par l’État (42 €/MWh jusqu’en 2025).
Pour savoir ce qui se passera après la fin de l’ARENH dès 2026, nous vous invitons à lire cet article.
De son côté, le mécanisme de capacité impose aux fournisseurs d’électricité de prouver qu’ils disposent (directement ou indirectement) de moyens de production ou de réduction de consommation suffisants pour couvrir les pointes de demande. Cela garantit la sécurité d’approvisionnement lors des périodes de forte consommation, comme les hivers rigoureux.
Enfin, les garanties d’origine permettent de certifier que l’électricité vendue comme « verte » a bien été produite à partir de sources renouvelables. Pensez toujours à vérifier, ou à demander cette confirmation à votre courtier en énergie ! Ce système, encadré au niveau européen, évite les abus marketing et encourage fortement le développement d’une production décarbonée.
Qu’en est-il de l'encadrement européen ?
Le marché français de l’énergie ne fonctionne pas en vase clos. Il s’inscrit en effet dans le cadre du marché intérieur de l’énergie de l’Union européenne, dont les objectifs sont :
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la mise en concurrence,
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la sécurité d’approvisionnement,
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l’intégration des énergies renouvelables,
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la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Plusieurs lois ont progressivement été adoptées par l’UE, imposant notamment :
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la séparation des activités de production, transport et distribution (principe de "dissociation"),
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la création d’autorités de régulation indépendantes,
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l’ouverture des marchés nationaux à la concurrence.
La Commission européenne et l’ACER (Agence de coopération des régulateurs de l’énergie) assurent la coordination à l’échelle communautaire.
Les défis d’aujourd’hui et de demain du marché énergétique français
Entre hausse des prix, mix énergétique et développement des énergies renouvelables, les défis sont nombreux… et de taille !
Des prix de l’énergie volatils et souvent en hausse
Depuis 2021, les prix de l’énergie connaissent une forte instabilité. La reprise économique post-Covid a en effet provoqué une hausse soudaine de la demande mondiale, rapidement aggravée par la guerre en Ukraine qui a bouleversé l’approvisionnement en gaz, notamment russe.
Cette tension sur le gaz s’est répercutée sur le prix de l’électricité, en raison du fonctionnement du marché européen, où le prix de l’électricité est souvent indexé sur le coût marginal de production (souvent celui des centrales à gaz).
Heureusement, la France a su développer de bonnes stratégies de sécurisation de ses approvisionnements. Comme nous l’évoquons dans cet article traitant de la provenance du gaz en France, le pays a su développer des partenariats ingénieux et diversifiés avec de nombreux pays du monde entier, afin de sécuriser ses apports à long terme.
La transition énergétique, au cœur des défis énergétiques en France
Impossible de passer à côté de la transition énergétique, l’un des objectifs principaux de la politique énergétique française ! Objectif : réduire la part des énergies fossiles et développer les énergies renouvelables, afin d’atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050.
Bon à savoir : c’est la loi Énergie-Climat qui fixe un certain nombre de cibles ambitieuses, comme porter la part des énergies renouvelables à 40 % de la production d’électricité d’ici 2030.
Cela implique un développement massif de l’éolien, du solaire et de la biomasse, mais aussi des investissements dans les réseaux, le stockage et la flexibilité de la demande.
La précarité énergétique, un défi de taille pour la France
La hausse des prix de l’énergie a mis en évidence la vulnérabilité d’une partie de la population française. Environ 12 millions de Français sont en effet en situation de précarité énergétique, et peinent à chauffer leur logement ou à régler leurs factures.
Pour faire face, l’État a déployé des dispositifs d’urgence comme le chèque énergie et le bouclier tarifaire. Toutefois, ces aides restent ponctuelles face à un problème structurel. La rénovation thermique des logements, notamment dans le parc locatif ancien, fait partie des solutions incontournables pour mettre fin de façon durable à la précarité énergétique en France.
Le marché de l'électricité en France, en bref…
Le marché de l’énergie, ça peut sembler technique, voire un peu opaque… et pourtant, il nous concerne tous ! Que l’on parle d’électricité ou de gaz, ce sont nos factures, nos choix de consommation et notre quotidien qui sont directement impactés.
Nous avons, chacun à notre niveau, un rôle à jouer. Choisir une offre plus verte, mieux gérer sa consommation, s’informer sur ses droits : ce sont de vrais leviers d’action ! L’énergie n’est pas qu’une affaire d’experts ou de ministères. C’est un sujet de société, un défi collectif. Et plus on comprend comment ça fonctionne, plus on est armé pour faire les bons choix. Alors, restons curieux, attentifs… et exigeants ! Car c’est aussi par nous que passera l’énergie de demain.