France : la nouvelle feuille de route énergie et climat en 6 points
Mieux vaut tard que jamais ! Le vieil adage n’aura jamais été autant d’actualité qu’avec la feuille de route de la France sur l’énergie et le climat. Avec plus d’un an de retard, le gouvernement français a enfin soumis à consultation publique, le 4 novembre, sa feuille de route énergétique et climatique. Incarnée par la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), elle était très attendue, en vue de dessiner la trajectoire du pays vers la neutralité carbone d'ici à 2050. Découvrons les 6 points clés de la feuille de route sur l’énergie et le climat de la France.
Vers une mobilisation citoyenne pour la stratégie énergie et climat de la France
La nouvelle stratégie énergie et climat prend un virage à 360°, en intégrant une dimension de mobilisation citoyenne pour la construction de sa feuille de route.
Comme nous le savons, l’élaboration de cette stratégie a connu des retards et des obstacles, notamment en raison de la dissolution de l’Assemblée nationale et des changements de gouvernement récents. L’abandon en avril dernier de la Loi de programmation énergie et climat (LPEC) a compliqué encore davantage l’avancement de la feuille de route tant attendue. En l’absence de cette loi, le gouvernement a décidé de s’appuyer sur des décrets pour structurer la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).
Avec près d’un an et demi de retard, le gouvernement a enfin dévoilé début novembre 2024 les grandes lignes de sa stratégie, s’ouvrant au dialogue citoyen et aux acteurs économiques pour bâtir un projet collectif.
Cette concertation publique vise à recueillir un large éventail de retours avant l’adoption définitive des textes en 2025. Une synthèse des avis sera publiée pour finaliser ces documents, qui définiront les trajectoires et les objectifs de la France vers la neutralité carbone d'ici à 2050.
À retenir : en mobilisant les citoyens autour de cette transition, la France espère renforcer l’adhésion nationale à un avenir durable et bas-carbone.
Un objectif ambitieux de -50% à l’horizon 2030
L’urgence d’une stratégie claire pour l’énergie et le climat était au cœur des débats à la rentrée. Enfin, la France se fixe un cap ambitieux avec la nouvelle Stratégie nationale bas-carbone (SNBC3) : réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 50 % d'ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990. Autant se l’avouer, l’atteinte de l’objectif, plus élevé que les 40 % initiaux pour s’aligner avec les ambitions européennes, sera difficile à atteindre.
Ce défi exige une baisse annuelle de 5 % des émissions de gaz à effet de serre. On est bien au-delà des 2 % réalisés en moyenne entre 2017 et 2022 ! Le ministère de la Transition écologique se montre toutefois confiant. Il n’hésite pas à souligner que la France "est sur la bonne trajectoire", avec des résultats encourageants : une réduction record de 5,8 % en 2023, suivie d’une baisse de 5,3 % au premier trimestre 2024.
Pour atteindre les 270 millions de tonnes de CO2 équivalent d'ici à 2030, l’enjeu reste de taille.
Des efforts toujours importants pour le secteur de l’industrie
La nouvelle feuille de route énergie et climat de la France place l’industrie et les bâtiments au cœur des efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le fait n’est pas nouveau, puisqu’il s’agit de secteurs fortement polluants. En toute logique, le gouvernement poursuit donc ses efforts dans ce sens.
Pour ce faire, la feuille de route fixe des objectifs de baisse de 68 % et 62 % respectivement d'ici à 2030, par rapport à 1990. Dans ce cadre, la rénovation énergétique devient un pilier central de la stratégie : le gouvernement prévoit de rénover chaque année 200 000 logements collectifs et 400 000 maisons individuelles.
Bon à savoir : l’an passé, 569 243 logements ont déjà bénéficié de “MaPrimeRénov’”, tandis que les entreprises bénéficient des CEE (Certificats d’Économie d’Énergie).
Du côté des transports, un secteur particulièrement polluant, l’objectif est de réduire les émissions de 27 %, en misant sur l’électrification. L’objectif ambitieux du gouvernement : au moins 66 % des voitures neuves vendues en 2030 devront être électriques, avec 15 % du parc roulant converti. Des objectifs qui témoignent de l’ampleur des changements attendus pour atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050 !
Feuille de route énergie et climat : le budget carbone revu à la baisse
Dans sa nouvelle feuille de route énergie et climat, la France revoit à la baisse son budget carbone pour la période 2024-2028, en passant de 359 à 333 millions de tonnes de CO2 équivalent (Mtéq). Cette réduction traduit les incertitudes croissantes autour des capacités de stockage et d'absorption des puits de carbone. Ces derniers, qui absorbaient encore 28 Mtéq en 2019, n’en ont capté que 18 Mtéq en 2022. Leur capacité devrait encore chuter à seulement 9 millions de tonnes pour la période ciblée.
Cette diminution significative impose un effort supplémentaire dans la réduction des émissions, expliquant au passage les efforts demandés aux secteurs du bâtiment et de l’industrie. Contre toute attente, malgré cette baisse d’absorption attendue, le gouvernement demeure confiant dans ses ambitions climatiques. Cela s’explique par un renforcement des stratégies d'efficacité énergétique et par les innovations mises en place. Grâce à cela, l’État espère atteindre ces nouveaux objectifs, répondant aux exigences climatiques et européennes.
Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) : 60% d’énergie décarbonée en 2030
Dans sa Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), la France se fixe d'atteindre 60 % d’énergie décarbonée d'ici à 2030. Pour parvenir à cet objectif, le gouvernement souhaite travailler sur le volet du nucléaire, actuellement responsable de 65 % de la production électrique nationale.
L'objectif fixé en cet automne 2024 est de revenir à des niveaux de production passés, entre 360 et 400 térawattheures (TWh) par an. Ce plan inclut également le lancement d’un programme de construction de nouveaux réacteurs EPR2 pour renforcer cette capacité nucléaire.
En parallèle, les énergies renouvelables poursuivront leur développement, non seulement pour l’électricité, mais aussi pour des usages comme la chaleur et les biocarburants.
Le saviez-vous ? La PPE, révisée tous les cinq ans, est un outil de planification essentiel pour guider la France vers la réduction de sa consommation énergétique. Elle permet d’optimiser la montée en puissance d’une production décarbonée, afin de répondre efficacement aux objectifs européens et aux enjeux climatiques.
Feuille de route énergie et climat : où en sont les énergies renouvelables ?
Les énergies renouvelables, parlons-en justement ! Que prévoit le gouvernement à ce sujet ?
Malheureusement, la feuille de route énergie et climat de la France suscite des interrogations, alors même que les énergies renouvelables sont un domaine essentiel pour atteindre les objectifs climatiques. Contre toute attente, les 180 pages de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ne fixent pas clairement la part du renouvelable dans le mix énergétique à l’horizon 2030, un point pourtant exigé par Bruxelles.
Une telle omission place donc la France en désaccord avec la Commission européenne. Cette dernière réclame en effet 44 % d’énergies renouvelables dans la consommation finale pour 2030. En réponse, le gouvernement français propose une approche différente. Il souhaite comptabiliser à la fois les énergies renouvelables et le nucléaire, dans une cible de 58 % d’énergie décarbonée.
Selon une note de juillet 2024, la France viserait plutôt 35 % d’énergies renouvelables d'ici à 2030, un chiffre assez éloigné des 44% attendus… L’association France Nature Environnement juge elle aussi cet objectif bien trop faible, appelant le pays à une intensification des efforts pour s’aligner sur les attentes européennes.
En bref… Des objectifs ambitieux, sauf pour les EnR
Bien que les acteurs énergétiques soient soulagés par l’arrivée récente de la feuille de route énergie et climat, les associations environnementales s'inquiètent des objectifs encore insuffisants annoncés. Dans leur ligne de mire : le développement des énergies renouvelables, un point primordial pour contrer l'urgence climatique. Après les récentes inondations, qui illustrent les effets dévastateurs du réchauffement, l'enjeu est plus que jamais de protéger les populations, tout en réduisant drastiquement les émissions de gaz à effet de serre, pour offrir aux générations futures un avenir durable.