Les énergies marines renouvelables, ou thalasso-énergies, utilisent la mer et les océans pour générer de l'électricité. Bien que les principes technologiques remontent à l'Antiquité, ils furent longtemps délaissés, pour renaître depuis peu sous forme de technologies avancées. Des installations qui connaissent à présent une expansion rapide, dans un contexte de transition énergétique et de décarbonisation. 

 

La France, dotée d'importants atouts, vise à transformer ces innovations en réalité commerciale, en exploitant son potentiel maritime dans le but de répondre aux défis énergétiques actuels et futurs.

 

Énergies marines renouvelables : de quoi s’agit-il ?

 

Les énergies marines renouvelables (EMR) désignent toutes les technologies qui permettent de produire de l'électricité en utilisant les différentes ressources offertes par la mer et les océans. Ces technologies exploitent diverses forces naturelles du milieu marin, telles que : 

  • les marées, 

  • la houle, 

  • les courants océaniques, 

  • la température de l'eau,

  • les gradients salins. 

 

Ces eaux des mers, source d'énergie décarbonée, jouent un rôle majeur dans la transition vers un modèle énergétique plus durable. En tirant parti des forces marines, les EMR offrent un potentiel significatif pour contribuer à la production d'électricité de manière propre et renouvelable. 

 

La France, riche en ressources maritimes, cherche à transformer ces innovations en solutions énergétiques viables. Le but est clair : aider à relever les défis énergétiques actuels, tout en soutenant une économie plus respectueuse de l'environnement.

 

Les différents types d’EMR exploitables en France

 

Parfois encore méconnus du grand public, de nombreux systèmes d’exploitation d’énergie marine existent. Peu à peu, ils sont exploités en France et partout dans le monde, en vue de tendre vers une énergie toujours plus verte.

 

L'énergie hydrolienne : les éoliennes sous-marines

 

L'énergie hydrolienne tire profit des courants de marée pour actionner des hélices sous-marines, semblables à des éoliennes. Ce sont elles qui produisent de l'énergie électrique. Le gros avantage de cette méthode est la prévisibilité de production, puisqu’il est possible de calculer le mouvement des courants sur de longues périodes. L'emplacement des installations doit toutefois être soigneusement choisi, afin d’éviter les conflits avec le trafic maritime.

 

Sea Water Air Conditioning (SWAC), la clim naturelle 2.0

 

Le SWAC utilise l'eau profonde pour alimenter des systèmes de climatisation. Les territoires d'Outre-Mer, souvent confrontés à cette problématique, y voient d’ores et déjà un fort potentiel. Cette technologie pourrait en effet significativement réduire la consommation énergétique liée à la climatisation dans les régions chaudes.

 

L'énergie houlomotrice : les courants marins pour générer de l’électricité

 

L'énergie des vagues et de la houle, une ressource illimitée en mer, peut être utilisée pour produire de l'électricité. Encore au stade de recherche, l'énergie houlomotrice expérimente diverses méthodes telles que des caissons flottants ou des colonnes d'eau oscillantes pour capter l'énergie marine.

 

L'énergie marémotrice : quand les marées servent la transition énergétique

 

L'énergie marémotrice fonctionne par la construction de barrages sur les estuaires. Cette technologie utilise tout simplement (si l’on peut dire !) le mouvement des marées pour générer de l'électricité. 

 

Similaire aux barrages hydroélectriques, elle capture et utilise l'énergie de grandes quantités d'eau retenues. Ces dernières sont ensuite libérées afin d’actionner des turbines. La France, avec le barrage de la Rance en service depuis 1966, est un précurseur dans ce domaine !

 

L'énergie thermique : capter la chaleur des fonds marins

 

Utilisant les gradients de température entre les eaux de surface et les profondeurs, l'énergie thermique des mers est surtout étudiée dans les zones intertropicales et les territoires d'Outre-Mer. 

Concrètement, cette technologie vaporise un fluide, dans le but de générer de l'énergie en exploitant les différences de température.


 

Énergie marine renouvelable : avantages et limites

 

Les énergies marines renouvelables représentent une source d'énergie inépuisable, les océans couvrant 72 % de la planète. Bien que sous-exploitée, cette ressource est disponible dans de nombreux pays, bordés par une mer ou un océan, voire plusieurs comme en France. Certaines technologies, telles que l'énergie marémotrice, sont éprouvées, fournissant d’ores et déjà une énergie décarbonée. Elles ont par ailleurs un impact visuel réduit, puisque les hydroliennes sont totalement immergées.

 

Malgré tout, les énergies marines renouvelables présentent aussi quelques limites. Par exemple, leur fonctionnement est intermittent ; un inconvénient toutefois modéré par la prévisibilité de certains systèmes hydrauliques. Les coûts restent par ailleurs élevés (installation, entretien), en raison de la corrosion générée par la salinité. 

 

Dans la mesure où nous n’en sommes qu’aux balbutiements de l’énergie marine renouvelable, la plupart des technologies sont encore immatures, et leur accès en haute mer compliqué. 

 

Enfin, on ne peut oublier un inconvénient majeur : les technologies humaines, quelles qu’elles soient, peuvent considérablement impacter la faune marine.

 

Quels sont les enjeux du changement climatique liés à l’énergie marine renouvelable en France et dans le monde ?

 

Les énergies marines renouvelables doivent absolument entrer dans la norme si l’on veut atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050, conformément au Pacte vert pour l'Europe, au Plan Énergie et à l'Accord de Paris. N’oublions pas, parmi les buts à plus court terme, l’objectif français de produire 40 % d'électricité renouvelable d'ici à 2030

Pour accélérer cette transition, il est nécessaire d'augmenter dès aujourd’hui les investissements dans le développement de ces technologies, tout en maîtrisant leur impact environnemental.

 

Les enjeux économiques et industriels des énergies marines renouvelables

 

Les EMR présentent un potentiel significatif de création d'emplois. Toutefois, des défis économiques majeurs se posent, notamment en termes de rentabilité et de coûts initiaux élevés. L'intégration de l'électricité marine au réseau électrique terrestre nécessite en effet de lourds aménagements financiers

 

En plus de ce souci de taille, le développement des compétences et la régulation des espaces maritimes représentent, eux aussi, des défis sociétaux et réglementaires majeurs.

 

Perspectives et développement des EMR en France

 

La France, avec ses 11 millions de km² d'eaux, possède un fort potentiel pour le développement des EMR. L'éolien offshore est particulièrement prometteur, avec plusieurs projets en cours qui devraient créer jusqu'à 15 000 emplois

 

La stratégie française de développement des EMR, totalement inscrite dans le cadre du Pacte vert européen, vise à soutenir la recherche et le déploiement commercial des technologies, afin d’atteindre les objectifs d'électricité renouvelable à l'horizon 2030.

 

EMR : un gigantesque potentiel exploitable en France

 

Entourée d’eau au nord, au sud et à l’ouest, la France dispose d’un vaste terrain de jeu pour développer les énergies marines renouvelables.

 

Le potentiel des énergies marines renouvelables en France

 

Bien que seule l'usine marémotrice de la Rance soit actuellement opérationnelle, les côtes normandes, bretonnes et ligériennes offrent un excellent cadre pour l'énergie hydrolienne. Pour preuve, ces espaces marins représentent environ 20 % du potentiel européen. Les technologies d'énergie thermique et SWAC peuvent quant à elles être développées dans les territoires d'Outre-Mer.

 

À noter  : les régions Aquitaine, Languedoc-Roussillon et PACA, bien qu’exploitables, disposent d'un potentiel plus modeste.

 

La contribution des énergies marines renouvelables au mix énergétique

 

Le mix énergétique désigne la répartition des différentes sources d'énergie utilisées pour répondre aux besoins d'un pays ou d'une région. Il inclut les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon), nucléaires et renouvelables (solaire, éolien, hydraulique, biomasse, etc.). 

 

Actuellement, l'énergie marine représente moins de 0,1% du mix énergétique français, se classant derrière d'autres sources renouvelables comme l'éolien, l'hydraulique, la biomasse ou la géothermie. Cependant, le ministère de la Transition Écologique estime que la production d'EMR pourrait atteindre 2 000 à 3 000 MW dans les années à venir.

 

Une réelle volonté gouvernementale

 

La programmation pluriannuelle de l'énergie vise d’ores et déjà entre 200 et 2 000 MW de production supplémentaire d’EMR d'ici à la fin 2023. L'État, via l'ADEME et le programme des investissements d'avenir (PIA), finance des projets de recherche, des démonstrations technologiques et des fermes pré-commerciales, afin de soutenir l'innovation dans ce domaine

 

Les principaux acteurs de l’EMR en France

 

Institutions d’État et acteurs français se mobilisent depuis plusieurs années pour intégrer au mieux les EMR dans leurs projets.

 

Le rôle des institutions gouvernementales et du CRE

 

L'État et ses services facilitent la recherche et l'octroi de licences pour l'exploitation, notamment, des parcs éoliens en mer. La Commission de Régulation de l'Énergie (CRE) est quant à elle formelle : les installations respectent les normes du marché et de l'Union européenne. Le projet est donc en bonne voie ! 

 

De son côté, le Réseau de Transport d'Électricité (RTE) est responsable des connexions à haute tension entre les parcs éoliens marins et le réseau terrestre. C’est donc lui qui est garant de l'acheminement de l'électricité vers les consommateurs, comme pour toute autre source d’énergie électrique.

Les acteurs privés, maillons indispensables de la chaîne

 

Les acteurs privés jouent un rôle crucial dans l'avancement des énergies marines renouvelables (EMR) en France. Leur implication est multidimensionnelle, allant du développement à la construction et au financement des projets. Ils sont essentiels à l'essor de ce secteur prometteur, contribuant ainsi à la transition énergétique du pays.

 

La catégorie des acteurs privés regroupe : développeurs, constructeurs, financeurs. 

Ils sont essentiels à l'avancement des EMR en France. Parmi eux, Sabella se distingue avec le développement de ses hydroliennes, anticipant l'industrialisation de modèles de plus grande capacité. De son côté, Open-Hydro teste actuellement un nouveau prototype d'hydrolienne. DCNS, en collaboration avec Akuo Energy, développe NEMO, un projet de plateforme flottante de 16 MW.

 

Ces entreprises, à la pointe de l'innovation dans le secteur des EMR, illustrent l'engagement de la France en faveur du développement durable et de la production d'énergie renouvelable.

Développement de l’énergie marine à l’étranger : où en est-on ?

 

D’après l'Agence Internationale de l'Énergie, le potentiel théorique mondial des énergies marines se situe entre 20 000 et 90 000 TWh/an, surpassant la consommation mondiale actuelle (16 000 TWh/an). Les chiffres sont prometteurs, puisque chaque technologie pourrait atteindre : 

  • Jusqu'à 80 000 TWh/an pour l'énergie houlomotrice.

  • 10 000 TWh/an pour l'énergie thermique des mers.

  • Entre 300 et 800 TWh/an pour les énergies hydroliennes et marémotrices combinées.

La Grande-Bretagne est notamment bien positionnée pour développer ses capacités d'énergie marine. Le pays a déjà accordé des concessions pour plus de 1 GW, avec un potentiel total estimé à plus de 10 GW.

 

Le rôle des régions dans le développement des énergies marines renouvelables

 

Les régions côtières françaises, de la Normandie à la Provence-Alpes-Côte d'Azur, jouent un rôle crucial dans le développement des EMR. 

Bien que l'énergie et la mer soient des domaines régaliens, les régions collaborent activement avec l'État pour accompagner la croissance de la filière. L’implication de chaque acteur facilite le dialogue avec les parties prenantes et la gestion de l'acceptabilité territoriale, notamment pour l'éolien en mer. 

 

Comme l’affirmait récemment un élu au conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, les régions peuvent jouer le rôle d’intermédiaire entre l’État et les différents acteurs du marché. Un point à ne surtout pas négliger !

 

EMR : l’heure du premier bilan de l’UE

 

L'Union européenne vise un développement significatif des énergies marines renouvelables, malgré des obstacles persistants. Un rapport de la Cour des comptes européenne, publié le 18 septembre 2023, indique que malgré 17 milliards d'euros d'aides depuis 2007, les résultats restent malheureusement mitigés.

 

Des conséquences environnementales à surveiller

 

Les installations technologiques des EMR ont un impact environnemental significatif. La Cour (CCE) souligne un "dilemme écologique" où la législation européenne doit concilier le développement des EMR et la protection de la biodiversité. 

 

Les risques à prendre en compte sont notamment : 

  • l'altération de la qualité de l'eau, 

  • les perturbations sonores sous-marines, 

  • la dégradation des habitats,

  • les effets des champs électromagnétiques.

 

Des objectifs trop ambitieux ?

 

L'UE souhaite atteindre 60 GW de capacité pour l'éolien en mer et 1 GW pour les énergies océaniques d'ici à 2030. En 2020, la capacité éolienne était seulement de 12 GW, l'énergie océanique étant presque inexistante. 

Fin 2022, l'éolien en mer comptait environ 30 gigawatts (GW) installés au large des pays européens, et environ 60 gigawatts dans le monde entier. 

La coopération transfrontalière est encouragée, notamment via le projet EMR de la mer Baltique, mais reste toutefois limitée.

 

Attention à la dépendance géopolitique !

 

Tout comme pour le gaz, la France et les différents pays de l’Union européenne sont trop dépendants des autres pays du monde. En cas de tensions géopolitiques, nous sommes malheureusement bien démunis. Le rapport met notamment en lumière la dépendance de l'UE envers la Chine, principal fournisseur de matières premières pour les installations EMR.

 

EMR : continuons sur notre lancée !

 

Les énergies marines renouvelables offrent un potentiel considérable pour répondre aux objectifs climatiques mondiaux, malgré des défis techniques, environnementaux et économiques. 

 

Pour que ce potentiel se concrétise pleinement, les stratégies nationales et européennes doivent renforcer la recherche, l'investissement et la coopération internationale. Seulement ainsi pourrons-nous exploiter pleinement ces ressources et bâtir un avenir énergétique plus durable.

 

En parallèle de ces efforts, les énergies renouvelables terrestres, ainsi que le gaz renouvelable, sont eux aussi pleinement exploités. 

Cependant, l'urgence climatique exige une accélération de notre transition énergétique. Les années à venir seront déterminantes : elles révéleront si nos actions actuelles ont porté leurs fruits et si nous sommes sur la bonne voie pour garantir un avenir durable pour les générations futures.